31/10/2018 Accessibilité
Accessibilité et universalité
Photo Jeanne Menjoulet &Cie
En France, l’accessibilité c’est historiquement une loi qui doit permettre l’égalité des droits et des chances, ainsi que la participation et la citoyenneté aux personnes handicapées. Cela implique donc des aménagements ou des modifications techniques des lieux ou des produits pour les rendre compréhensifs et utilisables par les personnes handicapées. L’accessibilité est donc une notion centrée sur le handicap.
Dans la conception universelle, la création d’un lieu par exemple est pensée et planifiée de manière à pouvoir accueillir toute sorte de personnes, sans discrimination, avec ou sans handicap. Elle ne vise pas en particulier une sorte de handicap mais pense de manière globale en prenant en compte tous les “états” possibles d’une personne.
Avantages de la conception universelle
Comme déjà vu, le premier point positif c’est qu’elle ne stigmatise pas le handicap. On se retrouve avec un objet ou un lieu identique pour tout le monde.
Prenons un exemple : un musée dont l’entrée se fait via un grand escalier et qui dispose d’une entrée réservée derrière avec un monte-charge est accessible aux yeux de la loi. C’est positif et un bel effort, mais la personne en fauteuil roulant se sentira forcément « différente » car le musée l’accueille différemment en lui proposant une entrée alternative…
Bien sûr les musées sont souvent d’anciens bâtiments classés monuments historiques et il est parfois difficile de les modifier (mais pas impossible, beaucoup d’efforts sont encore à faire à ce niveau). La raison est souvent d’ordre financier car modifier quelque chose de déjà conçu est parfois complexe et long. Dans la majorité des cas malheureusement, les propriétaires se contentent de la solution la plus simple et la moins chère ; les effets stigmatisant ou discriminatoires sont mis de côté.
Avec l’approche universelle, il n’y a pas une entrée handicapés et une entrée valides ; les deux se font au même endroit.
Autre point positif à la conception universelle, c’est la portée : un contenu universel va toucher plus de monde. Si un livre par exemple est publié en plusieurs langues, il va pouvoir être lu dans d’autres pays et cultures. L’auteur aura plus de chances que ses idées soient lues. Une autre conséquence indirecte, c’est que cela va apporter une égalité d’accès à tous les lecteurs, la langue n’est plus un handicap ni un frein à l’égalité.
Un autre avantage, c’est la pérennité. Pour l’exemple du livre, si une langue disparaît des usages, les idées perdurent aux travers des autres langues.
Si certains handicaps augmentent ou au contraires disparaissent, le lieu ou le produit restera toujours utilisable !
Encore une chose intéressante, c’est qu’en pensant aux utilisateurs ayant un handicap lors de la création d’un lieu ou d’un produit, il y a de fortes chances que ce produit ou lieu fonctionne pour tout le monde.
Exemples : mêmes objets, mêmes lieux pour tout le monde
Dans notre quotidien, nous pouvons déjà trouver certains objets de conception universelle :
La douche à l’italienne
Cette douche à entrée de plain-pied est indispensable pour les personnes à mobilité réduite. Inspirée des thermes romains (bains de la Rome antique), elle est en fait un confort pour tout le monde (sans compter les aspects esthétique et pratique).
(Photo Les Hôtels JARO)
Rampe escalier
Il s’agit d’un seul objet qui propose deux utilisations différentes pour un même service. Il n’y a pas une utilisation mise en avant, la rampe et l’escalier s’entremêlent harmonieusement.
Robson Square, Vancouver. Désigné par Arthur Erickson et Cornelia Oberlander.
(Photo mag3737)
Entrée plain-pied dans les bus
En Norvège des bus ont été équipés d’entrée plain-pied. Cette entrée permet aux fauteuils mais également aux poussettes ou aux valises à roulettes de rentrer facilement. Une étude a montré que cet accès facilité réduis le temps de “chargement” du bus et le temps de trajet global.
(Voir Diaporama de James Odeck, The Norwegian University of Science and Technology, and Norwegian Public Roads Administration)
Le Velcro
Ce système agrippant est très utile pour les personnes avec des difficultés motrices car il nécessite peu d’efforts. Étant donné son coté pratique, il est utilisé dans le quotidien de tout le monde.
(Photo keimevo)
La télécommande
Elle a été créée dans les années 50 pour faciliter la vie des personnes à mobilité réduite. Aujourd’hui tout le monde l’utilise, personne ne se lève de son siège pour changer de chaîne par exemple.
(Photo Nicolas Buffler)
La conception universelle dans le Web
Tim Berners-Lee, directeur du W3C et créateur du Web a dit : « La nature du web est dans son universalité. Il doit être accessible à toutes les personnes handicapées ».
Pourtant, plus de 20 ans après sa création, la plupart des contenus ne sont pas correctement accessibles pour une bonne partie de la population bien que la technologie Web le permette.
Beaucoup d’éditeurs de contenus ne sont pas encore assez sensibles à cet aspect et ne considèrent pas cela assez important pour s’investir un peu plus, ce qui est dommage.
Les efforts à effectuer au niveau Web ne sont pourtant pas énormes, ils le sont beaucoup moins que dans le domaine des transports ou de l’architecture.
Si des modifications sont possibles sur les contenus déjà conçus pour les rendre accessibles (ce qui est souvent pratiqué, on pense à l’accessibilité souvent après conception), il n’est pas toujours possible d’apporter une réponse satisfaisante, surtout sur la partie graphique et la mise en page. On aura rarement un résultat optimal car quelque chose de déjà conçu est difficilement modifiable (tout comme les monuments historiques). Il parait alors évident que l’accessibilité doit être pensée dès la conception, le vrai investissement se trouve plutôt dans la manière de concevoir les contenus. Il faut juste y être plus sensible dans chacun des corps des métiers du Web (design, ergonomie, UX, intégration html,…).
Dans le Web, concevoir universel, c’est, par exemple, privilégier une lisibilité accrue par défaut. Avec la possibilité pour ceux qui le veulent de baisser la taille de texte par exemple. Ce qui compte c’est que tout le monde a accès à l’information sans avoir à faire un effort particulier. C’est aussi, par exemple, mettre systématiquement des sous-titres aux vidéos et les activer par défaut. C’est aussi bien coder son code HTML avec les spécifications des lecteurs audio de site Web pour qu’ils puissent transcrire des informations claires et compréhensibles aux mal-voyants (en savoir plus sur ces spécifications).
Il ne faut pas oublier que tout cela est utile pour tout le monde dans beaucoup de situations rencontrées au cours de la vie (fatigue, baisse de la vue, métro, etc…) : ce n’est pas seulement un investissement pour répondre aux besoins d’une population spécifiques mais un investissement pour améliorer un service dont tout le monde pourras profiter tout en agrandissant sa portée.
Cette façon de concevoir passe par la prise de conscience que le Web est devenu un moyen incontournable dans la société d’aujourd’hui et qu’il mérite et doit avoir l’exigence d’être universel. Il me parait évident que les métiers du Web sont amenés à être plus exigeants et responsables, tout comme l’est l’architecture aujourd’hui.
Conclusion
La conception universelle garantit l‘égalité d’accès mais pas seulement. En proposant le même lieu ou le même objet pour tout le monde elle évite de marquer une différence entre les personnes et évite la stigmatisation que cela peut provoquer. Elle favorise la participation et aide grandement à se sentir égal aux autres dans la société.
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Sources
Sur la conception universelle
www.conceptionuniverselle.com
http://www.conceptionuniverselle.com/la-conception-universelle-quest-ce-que-cest
Sur l’accessibilité Web
http://www.accessiweb.org/http://www.w3.org/WAI/intro/aria
Merci à Delphine Malassingne et Nyssia Gillon pour leur aide.