21/03/2019 3 Minutes read Innovation 

La blockchain et le secteur du transport : opportunités et freins. Interview d'Hugo Briand, Architecte et Lead Blockchain chez ekino

Bien que les technologies blockchain n’en soient qu’à leurs balbutiements, elles n’en génèrent pas moins un fort engouement. Promesses de traçabilité, de transparence et d’autonomie, ces technologies augurent un bel avenir aux entreprises qui sauront trouver des cas d’usage. Aujourd’hui, c’est déjà le cas pour le secteur du transport, qui voit dans les technologies blockchain une opportunité de rassurer les consommateurs sur la fiabilité de la chaîne logistique tout en assurant une fluidification des relations entre les différents partenaires. Hugo Briand, Architecte et Lead Blockchain chez ekino analyse pour nous les opportunités et les freins de ces technologies dans le secteur du transport. Interview.

La blockchain est-elle un moyen d’optimiser, voir de réduire les coûts liés aux transports de marchandises ?

Les technologies Blockchain permettent avant tout de fluidifier les transferts de valeur, et de fluidifier les opérations de certification, notamment en permettant de se passer de tiers de confiance sur certains processus. Dans le cadre des opérations de transports de marchandises, il y a la plupart du temps un flux de valeur inverse associé (les marchandises transportées le sont contre une contrepartie financière). La blockchain et les crypto-monnaies peuvent fluidifier ces transferts de valeurs, notamment ceux qui sont internationaux. On peut notamment citer l’exemple récent de cet échange de pesticides entre l’Argentine et le Paraguay qui a été réglé en Bitcoin, ce qui a permis d’avoir un transfert de valeur plus rapide et moins coûteux qu’avec le système SWIFT (qui permet les transferts d’argent internationaux entre les banques).

Les technologies Blockchain peuvent aussi résoudre des problématiques de preuves certifiantes dans le cadre du transport de marchandises, accélérant ainsi la dématérialisation des processus et réduisant les traces papier. Cela permet donc d’avoir de meilleures données sur les systèmes de logistique tout en conservant le même niveau de confiance qu’auparavant. Nous pouvons par la suite exploiter ces données pour accélérer la remontée d’informations en cas d’incident dans la chaîne logistique.

La blockchain est-elle un moyen de rassurer les consommateurs sur la traçabilité et donc la fiabilité des produits ?

Les technologies Blockchain permettent d’apporter une preuve, et de garantir l’intégrité de cette preuve. Elles ne répondent cependant pas à la problématique de lien entre monde physique et numérique. Ça n’est pas une technologie améliorant directement la fiabilité des produits, mais elle agit en catalyseur de la dématérialisation. C’est elle qui permet d’accélérer la récupération des informations en cas d’incident, et donc de rassurer les consommateurs sur la fiabilité de la chaîne logistique et des produits associés.

Quelles opportunités pour quelles industries ?

Les opportunités sont multiples, et surtout pas encore toutes identifiées. Toutes les industries peuvent bénéficier d’une numérisation des transferts de valeur. La plupart d’entre elles peuvent voir leurs processus de production fluidifiés grâce à la réduction des tiers de confiance. C’est pourquoi nous proposons d’étudier et d’identifier les opportunités de la technologie au travers d’ateliers de service design pour les entreprises qui souhaitent adresser ce sujet stratégique. Nous pouvons cependant identifier quelques secteurs qui peuvent en bénéficier dès maintenant, comme le transport et la logistique notamment. Mais aussi le secteur de l’énergie qui voit ses premiers cas concrets émerger sur les aspects de certification d’énergie verte ou pour l’implémentation des boucles locales. Le secteur des médias peut aussi en bénéficier, par exemple pour le suivi des droits d’auteur. Mais ce ne sont là que quelques exemples.

Quels sont les principaux freins ?

La technologie est toujours en cours de maturation, il faut donc adopter une approche pragmatique. Aujourd’hui nous rencontrons encore des problématiques de scalabilité par exemple, bien qu’elles se résolvent grâce à l’émergence de nouvelles technologies telles que le Lightning Network, celles-ci sont encore au stade expérimental.

Il faut aussi adresser les sujets de sécurisation, qui sont capitaux dans le cadre de projets blockchain. En effet, ceux-ci adressant du transfert et du stockage de valeur, ils sont sujets à de nouveaux types d’attaques informatiques ou d’erreurs d’usage – il serait par exemple fâcheux d’envoyer les crypto-monnaies de l’entreprise à une mauvaise adresse. C’est pourquoi la problématique de sécurisation aussi bien informatique que des processus de l’entreprise est capitale à prendre en compte dans le cadre de ces projets. La bonne nouvelle est que nous savons adresser ces sujets, mais cela requiert une certaine pédagogie.

La blockchain permettra-t-elle l’accélération de la création de nouveaux moyens de transport ?

A mon sens, nous allons surtout voir émerger de nouveaux modèles commerciaux liés aux transports grâce aux crypto-monnaies. On peut par exemple imaginer utiliser les capacités de micro-paiement de Lightning Network pour payer ses trajets à la distance parcourue. En Argentine il est d’ores et déjà possible de payer son trajet en Bitcoin.
En allant plus loin, on peut imaginer avoir des véhicules qui paieront eux-mêmes leur stationnement, leur assurance et leurs péages. C’est aussi une très belle opportunité pour les moyens de transports partagés et les modèles reposant sur l’économie collaborative : on peut envisager un système de covoiturage où l’ensemble des passagers acceptent de partager les frais du trajet automatiquement réglés par la voiture à parts égales par exemple.

La blockchain permettra t-elle la sécurisation des transports dits “du futur” comme les avions automatisés ?

Il est très difficile de jouer au futurologue, d’autant que nous ne connaissons pas encore toutes les implications de ces nouveaux moyens de transports. Cependant ça ne me semble pas être directement corrélé. Les technologies blockchain ne sont pas des solutions de sécurisation à proprement parler – c’est la cryptographie qui sécurise dans ce cas précis. Elles permettent de réduire le besoin de certification par un organisme, on peut donc imaginer que si ces technologies arrivent dans la chaîne logistique de la production d’avions, elles amélioreront indirectement la sécurisation de ces moyens de transports. Mais nous ne pouvons pas aujourd’hui y voir d’impact direct.

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